La quête

Le sens de l’équité ne dépend pas de l’adhésion à un dogme, politique ou religieux. Seule importe la quête de la probable vérité.

Leitmotiv (auto-moralisateur ?) : « Qui suis-je pour porter un jugement quelconque ? Regarde le miroir de l’âme et vois ! » Et pourtant …

La nécessité de penser conforme à cette vérité que l'on croit universelle ne conduit-elle pas à l’occultation involontaire, et même au rejet de nos convictions les plus intimes ? Ces convictions ne sont-elles pas induites voire confortées par les obscures impositions issues d’un atavisme à l’empreinte indélébile ?

La plus grande frustration de l’intelligence réside tant dans la quête complexe des mots justes censés illuminer la pensée que dans l’impossibilité de percer le brouillard de l’inconscient et d’en palper la richesse ! 

Propulsion brutale dans la vie, obligation de subsister, au sein d’une société qui enferme, n’est-ce pas contraire à une recherche de pureté et d’élévation mue par une liberté à laquelle chacun aspire ?.

Notre monde régi par des lois immuables nous transporte, nous dirige, nous dicte ses principes pour le bien vivre ensemble, … moi qui n’ai rien demandé, qui suis confronté à ce scénario que la raison collective impose. Cette société qui me heurte, qui me bouleverse me pousse à m’éloigner et à préférer un isolement salvateur.

D’harcèlements et brimades qui polluent ma mémoire forgée par les souvenirs d’enfant meurtri, en incompréhensions réciproques, mon blindage devient ma seule défense. Derrière ce blindage, la garantie de subsister m’amène à nier cette hyper-sensibilité qui tente de transpercer la carapace mais ne le peut par crainte d’être détruit. L’isolement me conduit à laisser cette sensibilité éclore par jets inconscients pour contrecarrer la pression de l’humain. La vraie nature dans son essence pure et son éclat ainsi me sourit en un flash qui m’éblouit mais qui s’estompant me fait ressentir les ténèbres plus opaques encore ! Au gré de mes angoisses, je recherche une vérité qui devrait me rassurer et donner un sens à ma vie sur cette terre, mais cette recherche vacille et se rebelle face à l’ironie d’autrui, face la mauvaise foi, face à l’hypocrisie d’une société dont la volonté consiste trop souvent à tenter transcender les moyens d’y parvenir, tout en faisant miroiter pour chacun la liberté de penser.

La tentation de provoquer devient dès lors difficilement répressible, éprouvant de réelles difficultés face à ceux qui veulent laver plus blanc que blanc, qui s’aveuglent devant une réalité qui les dépassent, qui refusent la sérénité d’un échange positif, se cabrent ou se taisent par abandon ou par mépris !

La foule, la promiscuité me stressent, dans ce ressenti de petits volcans qui sommeillent ou dans l’appréhension de l’inconnu ? J’ai peur de l’immixtion dans ma bulle salvatrice. A contrario, lors de tentatives d’en sortir, j’aime cependant m’ouvrir aux autres par la recherche d’une empathie réciproque qui contribue à nous élever mutuellement, mais ce, au sein d’un univers plus restreint qui est censé apaiser.

La foule aux grandes idées qui manifeste me met mal à l’aise. Je la ressens mue par le ballottement des émotions indéfinies et le rapprochement d’idées confuses. Elle se regroupe et se dilue au sein d’une homogénéité rassurante. L’être y trouve ainsi solidarité et repères, excluant de ce fait la perspective d’une élévation individuelle.

Dans quelle couche éthérée où la pensée s’évade, pourrait se complaire la recherche vers un idéal personnalisé si le silence et la méditation n’en sont pas les prémices ? L’accession espérée est cependant freinée par le tumulte des voix contraires ; le brouillard demeure, rend opaque notre inconscient et enraye son éveil attendu ! Je cherche à cerner ce moi intérieur qui s’échappe à mes sens et je pousse un soupir qui trahit ma désespérance d’être humain limité ! Les croyances ataviques épaississent ce brouillard qui occulte toute possibilité d’ouverture métaphysique et astreint l’Homme à configurer sa vie selon les normes édictées.

L’angoisse du rejet de ses pairs ravale l’être humain à une situation basique de dépendance, celle d’esclave de la pensée unique, celle de la domination idéologique ! Ces croyances, quelles soient religieuses, éducatives ou héritées, représentent un poids lourd à porter ; elles peuvent contrecarrer les initiatives, voire condamner les aspirations légitimes et in fine vouer aux gémonies ceux qui sortent des normes établies par décret ou par interprétation d’exégètes inspirés.

Sans cesse, ces croyances balisées par les dogmes et les rites refont surface, poussent à remettre en question l’être épris de liberté et de jouissance. La culpabilisation renaît. La réaction s’inscrit dès lors dans la provocation ou la dissimulation et crée ainsi un sentiment de mal être en contradiction avec la clarté recherchée. Et l’on trébuche sur le chemin, de nouveau fragilisé par les incessantes interrogations sur nos pensées et nos actes !

J’aspire à l’initiative courageuse nécessaire à vouloir sortir de ce conformisme qui contraint la pensée libre à se plier à la pensée collective. Se dégager de cette emprise expose au rejet. Elle s’avère néanmoins indispensable à l’élévation au-delà du déterminisme ordinaire. Voilà le Graal, celui de l’accession à la vérité sans balises mais porté par le souffle de la pureté, non pas celle qui conduit à la perfection, mais bien celle qui accompagne l’Homme sur le parcours chaotique de sa vie dans le respect et l’équilibre des valeurs partagées. Or, des voix s’élèvent de part et d’autre du chemin pour me rappeler les devoirs de la conscience collective et je trébuche souvent sur un sol devenu trop rugueux, fragilisé par l’isolement auquel je suis astreint.

Martial